Le Pont du Gard : un chef d’œuvre construit juste pour de l'eau ?

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Qu’est-ce qu’on y voit ? Un chef d’œuvre pour de l’eau

« Que ne suis-je Romain ! » s’exclame Rousseau lorsqu’il voit le Pont du Gard. L’ouvrage a de quoi l’éblouir. Haut de presque 49 mètres, édifié dans un robuste appareil de pierre calcaire, il a su traverser les siècles et demeure l’unique exemple connu de pont romain à trois niveaux. Et tout cela… pour de l’eau ?
C’est au 1er siècle ap. J.-C., sous le règne de Claude ou de Néron, empereurs de Rome, que les édiles de Nîmes décident d’édifier un aqueduc pour alimenter leur cité en eau. Bains publics, fontaines, riches demeures particulières sont de grands consommateurs du précieux liquide, surtout dans cette région relativement aride. La colonie romaine de Nemausus, fondée par Auguste en 27 av. J.-C., est alors à son apogée, et sa population augmente. Contrôler l’eau est à la fois une nécessité et une manière d’afficher son pouvoir.


L’aqueduc naît vers Uzès, à une vingtaine de kilomètres au nord de la ville ; mais il mesure pourtant près de 50 km. En effet, son tracé doit permettre l’écoulement de l’eau vers sa destination en profitant du phénomène de gravité, grâce à une pente aussi régulière que possible. Celle du pont du Gard est de 25 cm par kilomètre. Le trajet, précisément tracé par un géomètre, serpente donc à travers la campagne.

Sur la plus grande partie, l’aqueduc n’est qu’un simple canal, creusé à même le sol. Mais pour franchir le Gard, ou Gardon, il est nécessaire d’élever un pont afin de garder l’inclinaison. Les architectes romains en maîtrisent parfaitement la technique. Ils mettent tout d’abord à sec la zone où sont construites les piles, grâce à une palissade très serrée et à des treuils qui vident l’eau. Le nombre de piles doit être réduit, afin de résister au courant. Ensuite, les deux premiers niveaux sont élevés, dans un appareil de pierre calcaire qui n’utilise quasiment pas de mortier. Durcissant après leur extraction, les blocs sont frottés les uns contre les autres et maintenus par des crampons de chêne, leur poids assurant leur stabilité. Pour construire les arcs, les Romains utilisent des cintres de bois. Des pierres saillantes sur le mur permettent de poser des échafaudages. Enfin est érigé le troisième niveau. Là, du mortier de chaux est employé afin d’assurer l’étanchéité de la canalisation, où circule l’eau. Un entretien constant est nécessaire, pour gratter les dépôts de calcaire ou ajouter régulièrement un enduit d’étanchéité.

Utilisé jusqu’au début du 6e siècle, le Pont du Gard est abandonné au Moyen Âge. Le calcaire rend vite la canalisation inutilisable, mais l’ouvrage continue quant à lui d’être utilisé pour permettre le passage des gens et des chariots. Ce n’est qu’au 18e siècle qu’un nouveau pont routier est finalement construit non loin, laissant le monument romain à la simple admiration du public.

>> Retrouvez cette image analysée de manière interactive : http://passerelles.bnf.fr/explo/gard/index.php

>> Parcourez le dossier sur le Pont sur le site Passerelles : http://passerelles.bnf.fr/batiments/gard_planche.php

>> Lisez l’ébahissement de Rousseau face au monument, un extrait des Confessions : http://passerelles.bnf.fr/lire/gard_02.php

Image :
« Autre partie d'élévation en perspective du Pont du Gard », 1700
Dessin à l’encre de Chine et à l’aquarelle, 29 x 57,5 cm
BnF, département des Estampes et de la photographie, RESERVE HA-18 (A, 7)-FT 4